La culture du pastel a fait la richesse du Lauragais au XVIème siècle, situé au cœur du célèbre « Triangle d’or » entre Toulouse, Albi et Carcassonne. Les fortunes engendrées par cette plante offrant un bleu indélébile ont profondément transformé notre région. Partons à la découverte de ce riche patrimoine méconnu !

LES EGLISES DU PASTEL

Avant le XVIème siècle et la culture du pastel, la région était plutôt pauvre. La grande forêt de Saint Rome recouvrait une partie du territoire et les lieux de peuplement étaient épars. Chaque village avait bien entendu sa propre église car la religion était au cœur de la vie quotidienne.

Mais lorsque la culture du pastel devient intense, elle génère une prospérité sans précédent. Certaines personnes passent du statut de simples propriétaires terriens à bourgeois, voir noble quand ils peuvent acheter des charges grâce à leur fortune. Ils souhaitent dès lors que leur église soit à l’image de leur prestige social et font donc reconstruire ou embellir ces dernières.

  • Eglise Saint Martin de Nailloux  (fin du XVème siècle – début du XVIème siècle). A l’intérieur, les albâtres de Nottingham datent de la même époque.
  • Bourg Saint Bernard : (environ 1500- 1534) Très beau portail extérieur et l’intérieur a conservé son architecture d’origine.
  • Montgeard : (1522 – 1561) Admirez les tombes des marchands pasteliers dans les chapelles latérales, les albâtres de Nottingham encastrées dans les murs et le bénitier, ramené de Pise par un marchand pastelier, Jacques de Caussidières en 1516.
  • Loubens-Lauragais vers 1515

les châteaux du pastel

Ces marchands pasteliers ont eu à cœur de se faire construire des demeures ostentatoires pour montrer leur réussite sociale. D’ailleurs, il serait plus juste de parler « d’hôtels particuliers ». Ces marchands ont connu une ascension fulgurante dans l’échelon social. Sous l’Ancien Régime, les charges, c’est-à-dire les postes importants dans la fonction publique se monnayaient : quiconque avait de l’argent pouvait acheter un office et grâce à cela, parfois s’anoblir.

Il arrivait que ces marchands rachètent des châteaux déjà existants sur le territoire depuis le Moyen- Age et y fasse des travaux d’embellissement.
A la Révolution Française, la plupart de ces familles ont été dépossédées ou sont devenues maires de leur village.

  • Tarabel : Bâti sur un château préexistant du XIVème siècle, l’hôtel particulier a été aménagé à partir de 1540 par Pierre de Coustous.
  • Montgeard : L’hôtel particulier a été bâti ex nihilo en 1555 par Guillaume Durand.
  • Monestrol : Dans le sous-sol du château, se cache une cuve carrelée pour faire de l’agranat.
  • Loubens-Lauragais : Bâti sur un château fort dont on ne connait pas l’origine, c’est au XVIème siècle que le seigneur du village, Jacques de Loubens fait des embellissements dans sa propriété. Dans le parc, vous pourrez voir un ancien moulin pastelier servant aujourd’hui de fontaine.

LE COMMERCE DU PASTEL

L’expansion de ce commerce se fait dans la deuxième moitié du XIVème siècle. De par son aspect symbolique – c’est la couleur du manteau de la Vierge Marie – nombreux sont les nobles et bourgeois à vouloir posséder un vêtement de ce bleu si précieux.

Les cocagnes était mises en sac et sur chacun d’entre eux, il y avait le « logo » du marchand pastelier qui les expédiait. C’était un teinturier qui s’occupait de monter la cuve.

Certains lieux du Lauragais sont clairement cités en référence pour être des plaques tournantes du commerce du pastel. Les marchands toulousains viennent le chercher sur les étals, pour ensuite expédier le produit à travers toute l’Europe (Espagne-Angleterre-Italie-Pays Bas):

  • Avignonet-Lauragais : ville commerçante incontournable à partir du XIIIème siècle, renommée surtout pour ses draps et ses tissus. Du pastel et d’autres matières pour la teinture y sont vendus
  • Villefranche-de-Lauragais : Située à proximité du seul chemin empierré du Lauragais (la voie d’Aquitaine), cette ville est un « centre collecteur ». Ces collecteurs locaux sillonnent la campagne lauragaise de ferme en ferme, afin d’acheter la production et l’écouler au marché de Villefranche.
  • Caraman : lieu de vente attesté dès 1515.

Le saviez-vous ?

Autrefois, on utilisait les fonds de cuve de pastel pour peindre les menuiseries, les charrettes et les cornes des bœufs. En effet, le pastel possède des propriétés fongicides et insecticides.

Aujourd’hui, beaucoup de maisons et de fermes du midi toulousain ont conservé cette tradition de peindre les volets de cette couleur bleue. Sur fond de brique, c’est du plus bel effet !

REGARDS SUR UN PATRIMOINE INSOLITE

Pigeonnier à Monestrol : construit pendant la deuxième moitié du XVIe siècle par les Durand, riche famille de marchands  pasteliers  de Montgeard.



Les moulins pasteliers ont tous disparu aujourd’hui, mais dans les textes historiques, ils apparaissent souvent par dizaine sur une même ville au XVIème siècle. Ces témoignages nous laissent imaginer que l’activité liée au pastel était prépondérante ! Montesquieu Lauragais en dénombrait 15, Bourg Saint Bernard une vingtaine…