Par une belle matinée de printemps, nous avons décidé de nous mettre pour une fois à la place des touristes (ou plutôt des sportifs) qui pédalent le long du canal du Midi.
Comment les touristes appréhendent ils le Lauragais ? Que ressentent-ils quand ils le découvrent à travers cette magnifique voie d’eau creusée à la pelle et la pioche au XVIIème par des paysans du Lauragais dirigés par l’infatigable Pierre Paul Riquet ? Telles étaient les questions que nous nous sommes posées quand nous avons envisagé ce périple à vélo.

Un début sur les chapeaux de roues

Il est 10h30 quand nous commençons à pédaler. Il fait beau, le soleil brille. Une bien belle journée en perspective…nous nous réjouissons.

Nous nous sommes stationnés dans le joli village de Montesquieu Lauragais. Cet acte est hautement symbolique, car dans la rue de l’église se tient majestueuse la belle demeure de Jacques Duglas, qui était hôte sur le canal du Midi à l’auberge de Négra vers 1730.

Pont d’En Serny

Nous descendons donc tout schuss en directement du Pont d’En Serny. Personnellement, j’adore ce joli pont de brique du XVIIème siècle qui se reflète dans le canal en nous donnant l’illusion d’un cercle parfait ! Les petites maisons qui le bordent viennent compléter ce charmant tableau.
Le village de Montesquieu apparait rapidement sur les hauteurs : le clocher de son église est reconnaissable entre mille, il est typique des clochers murs du Lauragais !

Le soleil brille entre les platanes et réchauffe nos jambes. Nous avançons sur la piste cyclable goudronnée, le long du canal. Jusqu’ici, aucune difficulté, c’est tout droit et tout plat.
Cinq minutes plus tard, les canards nous accueillent à l’écluse de Négra. Ils sont nombreux à nager sur l’eau verte du canal ! Nous sommes toujours à Montesquieu : c’était ici que travaillait notre fameux Jacques Duglas. Aujourd’hui occupé par la base de location de bateau « Locaboat », les locaux servaient autrefois d’auberge et accueillaient les voyageurs pour la « dînée » (la pause méridienne). Au XVIIIème siècle, l’auberge de Negra offrait une halte immuable pour les gens qui allaient de Toulouse à Sète sur la Barque de poste. Nous remarquons aussi  la petite chapelle, accolée au bâtiment, où les voyageurs priaient une dernière fois avant de remonter dans la barque.

Des oiseaux et encore des oiseaux !

A l’écluse de Négra, des nichoirs géants ont été mis en place afin de proposer un refuge aux oiseaux habitant les berges du canal. Ça pépie, ça crie, ça chante… ils sont partout même s’ils restent tapis dans les branches des arbres.

Soudain, entre deux platanes, nous l’apercevons : son plumage gris, son bec orange, sa petite queue de cheval, pas de doute, il s’agit bien d’un héron cendré !  Ce grand timide ne se laisse pas photographier. Dès que nous avançons, il s’envole et c’est un jeu de cache-cache qui s’engage maintenant entre lui et nous.

Jusqu’ à la double écluse de Laval c’est un concert de chants gratuit qui nous est offert par nos amis à plumes ! Cette maison éclusière mérite un arrêt photo : bien qu’abandonnée (fini le temps où les écluses étaient actionnées par des humains !) , le lieu est très agréable pour faire une petite pause : boire un coup et manger un bout. La maisonnette, volets fermés, est isolée mais on devine tout de suite le potentiel « charme » qu’elle réserve !

Nous passons l’écluse des Agals à Gardouch et ses belles maisons colorées. Le bar l’Estanquet invite à la détente, mais nous ne nous laissons pas tenter malgré les appels de nos estomacs ! Une photo des belles péniches à quai, et nous voilà repartis.

Un peu plus loin, à Renneville, nous passons sur l’aqueduc des voûtes ! A cet endroit, sous le canal passe en effet un petit cours d’eau, l’Hers. Cet ouvrage date de 1690 ! En 2018, une grande campagne de restauration a été lancée, car les fuites étaient nombreuses et les problèmes d’étanchéité menaçaient la structure.

On a du mal à croire que dans les années 30, de nombreux baigneurs venaient se rafraichir ici l’été ! L’Hers servait de piscine et des plongeoirs étaient installés pour toutes sortes de jeux nautiques. Il y avait même des compétitions de natation ! Juste à côté, une guinguette proposait des goûters dansants et des soirées festives.

Maison éclusière de Laval

Le saviez-vous ?

Platanes abattus, oiseaux perdus !

Depuis 2015, les Voies Navigables de France financent un programme compensatoire suite à l’abattage massif des platanes malades le long du canal du Midi. Ce programme consiste en l’installation de nichoirs afin d’offrir aux oiseaux un espace pour nicher et se reproduire.

C’est ainsi que 1000 nichoirs ont été installés sur l’ensemble du linéaire du canal par la société coopérative et participative, Symbiosphère, basée à Fonsorbes. Un suivi des nichoirs à la caméra endoscopique est effectué 3 fois par an (principalement au printemps et au début de l’été). Ce suivi a permis de constater que les nichoirs d’oiseaux étaient parfois occupés par des petits mammifères tels des écureuils, des martres, des lérots…

Parmi les espèces d’oiseaux observées le long du canal, il y a (entre autres !)  la chouette chevêche, l’étourneau sansonnet, le grimpereau des bois, la sitelle torchepot et bien sûr, cette espèce rare et protégée, le Rollier d’Europe (sur la partie Méditerranéenne). Si vous avez envie de creuser le sujet, téléchargez l’application « Observatoire du canal » : vous pourrez ainsi sélectionner le tronçon où vous habitez et connaître les espèces d’oiseaux qui y vivent.

Pause méridienne bien méritée

Nos ventres criant famine, nous nous arrêtons à l’écluse suivante : celle d’Encassan , une des rares écluses non électrifiées du canal. D’ailleurs, nous apercevons au loin Didier, un employé de VNF (Voies Navigables de France) qui guette l’approche des bateaux de plaisance pour leur ouvrir les portes de l’écluse. En discutant avec lui, nous apprenons que le métier d’éclusier est complexe, puisqu’il est chargé aussi de réguler l’eau sur le canal.

A l’ombre d’un arbre, nous déplions la nappe pour commencer notre déjeuner sur l’herbe. Il fait bon, et le sandwich et la salade engloutis, nous repartons aussitôt. La pause aura été de courte durée, mais il y a encore quelques kilomètres à parcourir !
Nous filons jusqu’ à l’écluse Emborrel. Nous nous arrêtons pour remplir les gourdes grâce aux robinets mis à disposition des cyclistes. L’endroit est désert mais propre et bien entretenu.

Enfin, 2 km plus loin, nous voyons enfin le but de notre périple : Port Lauragais ! Cette aire d’autoroute n’est pas comme les autres. D’une part, il y a une chouette exposition sur les grandes thématiques du Lauragais (le vent, le pastel, les moulin…) et d’autre part une belle boutique de produits régionaux. Nous craquons pour un sachet de croquant (petits biscuits) que nous dégustons avant de repartir…car il faut maintenant pédaler dans le sens inverse !